Dix ans en politique: Pascal Bonin en a gros sur le cœur

MUNICIPAL. Ayant récemment franchi le cap des  dix ans dans le monde de la politique municipale, le maire Pascal Bonin a livré le fond de sa pensée sur  l’état actuel de la cause politique en général après la séance du conseil municipal. Compte-t-il lorgner un dernier mandat? Tout n’est pas encore coulé dans le béton pour le premier magistrat de Granby.

«Dix ans [en politique], c’est long, c’est très long, souligne le principal intéressé. C’est même surprenant que je sois encore là. Je suis une erreur politique de A à Z. C’est presque une incompréhension.»

Pascal Bonin est reconnaissant envers ceux qui lui ont donné une vie qu’il n’aurait jamais rêvé d’avoir. Encore aujourd’hui, il lui arrive de se dire que tout ce qu’il vit, ce n’est pas lui.

«Souvent, je regarde ce que j’ai à la maison et j’ai le goût de tout vendre, confie Pascal Bonin. Ils [les gens] m’ont donné une vie extraordinaire, mais je ne sais pas si je l’ai méritée. C’est un gros accomplissement quand tu es quelqu’un que les gens regardent avec mépris. Du jour au lendemain, ce banc-là se change pour une chaise et tu t’en vas en plein milieu d’une ville comme maire. Je pense que [les gens] n’ont pas tellement compris que c’était dur pour moi d’accepter ça. Ça me travaille encore; j’ai eu le syndrome de l’imposteur longtemps.»

Le maire de Granby est fier d’avoir atteint le cap des dix ans en politique municipale, mais pour lui, ce qui est le plus important, c’est d’avoir arrêté de boire pour sa fille lorsqu’elle avait deux ou trois ans. «Je suis fier d’avoir donné un père à ma fille; le restant n’a pas d’importance», admet-il.

De son propre aveu, le maire de Granby estime qu’il en est probablement à ses derniers milles en politique municipale. Par contre, il ne ferme pas la porte définitivement pour un troisième mandat.

«Il ne me reste probablement pas grand temps à faire et je veux que ça se passe bien, que ça se finisse bien, insiste le politicien. Je veux que les gens gardent un bon souvenir, mais je ne suis pas amer de rien. Quand je regarde le climat et tout ce qui se passe à l’heure actuelle, c’est moins intéressant que ça ne l’a déjà été pour moi. Je pense qu’un moment donné, le tour commence à être plutôt fait.»

Critique envers la politique

Le maire Pascal Bonin n’est pas toujours en accord avec les décisions qui se prennent en matière de politique au Québec. Selon lui, il y a encore place à l’amélioration.  «On a de la misère à se mettre en équipe pour faire quelque chose», souligne-t-il.

Selon lui, il n’y a pas de changements dans la province; rien ne se passe. «On tourne en rond, lance-t-il. Je pense qu’on fait erreur en ce moment. Quand je suis entré en politique, j’ai dit ce que j’allais faire et c’était clair comme de l’eau de roche. Là, c’est comme du popcorn; on ne sait pas où les gens veulent aller.»

Pascal Bonin déplore l’individualisme qu’on retrouve dans la société et que des gens se lancent en politique pour leurs propres intérêts et non pour ceux des citoyens.

«C’est tellement une obsession de plaire à l’électorat dans tous les milieux, on n’arrivera à rien, affirme le maire de Granby. En politique, quand on arrive en haut, on n’est pas là pour plaire aux gens, on est là pour prendre les meilleures décisions. Je commence à être tellement loin d’eux autres que j’ai de la misère à les rattraper. Il y a beaucoup de gens qui sont en politique pour eux, c’est ça la vérité.»

Agir au plus vite

Le premier magistrat de Granby se demande qui sera en mesure de rassembler tout le monde pour la question du climat. Il indique qu’il faut faire «une transition rapide et qu’il faut qu’il se passe [quelque chose]».

«C’est grave ce qui est en train de se passer avec la planète, rappelle-t-il. On a des jeunes qui sortent dans la rue et qui veulent qui se passe quelque chose.  En général, les plus vieux ne veulent rien savoir. Ça ne coordonne pas.»

M. Bonin note que pour qu’il y ait du changement, les gouvernements provincial et fédéral doivent «considérer les municipalités comme des partenaires».

«Être la vache à lait du Québec, je commence à être écœuré, lance le maire. On reçoit deux millions de touristes par année. Avec ce qu’on envoie en taxes provinciales et fédérales, on n’est même pas capable de se faire subventionner la police comme les autres. C’est une honte. Depuis des années, c’est comme ça. On envoie l’argent et ce qui nous revient, c’est à la miette.»

Pour Pascal Bonin, le rôle des municipalités ne doit pas être négligé pour faire avancer le Québec. Ce qui, selon lui, arrive trop régulièrement.

«Si on voulait vraiment un changement au niveau du climat, […] on ne traiterait pas les municipalités comme des imbéciles comme on le fait en ce moment. Moi, ça ne m’intéresse pas de travailler là-dedans. Je m’aperçois qu’il y a du monde qui ne veut rien savoir de nous autres. Je ne suis pas un gars patient et là, c’est très long à amener les projets.»

Est-ce donc un dernier tour de piste pour M. Bonin? «Je ne dis pas que c’est un non absolu, précise-t-il. C’est plus un non qu’un oui. Disons juste que c’est très difficile. Je parle en général pour les maires. Les années qu’on vit actuellement, selon moi, c’est presque indirigeable.»