La «créativité infinie» de Jonathan
TALENT. Tous ceux et celles qui l’ont un jour ou l’autre vu à l’œuvre vous le diront: Jonathan Proulx, 34 ans, possède littéralement un don. Le dessinateur au talent brut, atteint d’autisme et d’une déficience intellectuelle légère, cherche aujourd’hui une occasion de mettre son impressionnant talent au profit de sa communauté et d’intégrer, grâce à cette passion qui l’habite, le marché du travail.
Le Granbyen sort littéralement de sa zone de confort lorsqu’il rencontre le GranbyExpress dans les locaux de l’Association de Granby pour la déficience intellectuelle et l’autisme (AGDIA), qu’il fréquente plusieurs fois par semaine. S’il n’a pas l’habitude de rencontrer des journalistes et d’être confronté au cadre formel d’une entrevue, montrer ses innombrables œuvres, ça lui connaît. Sa gêne semble littéralement s’évanouir dès qu’il fait danser les pages de ses grands cahiers pour son interlocutrice.
«Il y a des dessins que ça fait longtemps que j’ai dessinés, mais moi, je les trouve tous beaux», explique d’emblée l’artiste, qui crée depuis ses sept ou huit ans. «Tout ce qui était mécanique, ça me passionnait, des voitures, des tracteurs, des camions. Je dessinais tout ce que je voyais. Ça a commencé comme ça», se rappelle-t-il.
Des éléments fantastiques tirés de films colorent ensuite ses cahiers. Son talent se développe au fil de ses innombrables tentatives, tant et si bien qu’aujourd’hui, le jeune homme se réjouit de ne «plus avoir de limite». «Je peux dessiner n’importe quoi. J’ai une créativité infinie», glisse-t-il en présentant ses croquis.
Sa tête, «un peu comme un ordinateur», fourmille d’idées; elle créé les plans des véhicules en tous genres, guerrières et villes futuristes que l’artiste se plaît à imaginer. «Je n’utilise pas de règle ni de mesure. C’est vraiment juste ma tête, ma main et mon crayon qui me dirigent», résume l’autodidacte, qui n’a jamais suivi la moindre leçon de dessin.
Amateur de noir et blanc, M. Proulx y va de détails impressionnants. «Des fois, je me demande même où est-ce que je vais chercher ça. Ce ne sont pas des choses qui existent réellement», lance celui qui adore écouter, tandis qu’il laisse son imagination jaillir, de la musique des années 1980 et 1990.
Jonathan trace au stylo noir, à main levée et sans procéder à la moindre correction, tous les dessins auxquels il se consacre. Chaque œuvre ne demande pas plus de 30 minutes au passionné qui a, à ce jour, participé à plusieurs expositions. Ce dernier a d’ailleurs eu la chance de faire la démonstration de son talent lors des portes ouvertes de l’AGDIA, qui se sont tenues le 18 novembre dernier.
L’homme dans la trentaine n’attend toutefois pas que de telles occasions se présentent pour partager ses créations. Il se met souvent à l’œuvre, l’été, sur des tables à pique-nique de la ville ou bien, quand l’envie lui prend, à la table de cafés. C’est empreint de fierté qu’il raconte combien les compliments de ses concitoyens fusent à l’égard de son travail. «J’aime ça montrer ça au public. Ça me fait plaisir et en même temps, ça m’encourage. J’ai eu beaucoup de très beaux commentaires», avoue celui qui accepte d’ailleurs les commandes spéciales.
En quête d’une première chance
S’il habite seul dans son propre appartement, situé non loin de l’AGDIA, Jonathan n’a pas d’emploi. Si cela lui laisse amplement le temps de se plonger dans son univers de création, il admet également que, d’une certaine façon, cette réalité l’ennuie: il aimerait avoir l’opportunité de gagner des sous en dessinant. Il a même débuté des recherches sur le Web. «J’aimerais ça en »tabarnouche »», lance-t-il. Celui-ci serait d’ailleurs heureux de savoir que des enfants, par exemple, pourraient s’amuser en coloriant ses œuvres.
La directrice générale de l’AGDIA, Diane Dumont, aimerait donner un coup de pouce à Jonathan afin qu’il se réalise dans le domaine qu’il aime; celle qui est déjà entrée en contact avec la créatrice de cahier à colorier lance en ce sens un appel aux citoyens et entrepreneurs du territoire.
«Jonathan, je suis sûre qu’il peut contribuer à la société en se trouvant un emploi. C’est ce que j’aimerais qu’il puisse faire pour s’épanouir encore davantage et qu’il ait l’impression d’avoir sa place dans la société. Pour l’instant, il dessine seul chez lui», explique la gestionnaire, qui estime qu’un tel talent doit être mis en lumière.
Les personnes qui souhaiteraient rejoindre Jonathan Proulx peuvent le faire via Mme Dumont (450 372-0694 ou dianedumontagdi@gmail.com).