Le vrai Philippe Dagenais
PERSONNALITÉ. Dans les années ’70 et ’80, Philippe Dagenais était le designer d’intérieur chouchou des vedettes québécoises. Bien avant l’arrivée des chaînes de télévision spécialisées et leurs émissions de «déco», le Bromontois a été la première star de l’aménagement intérieur.
L’impressionnante carrière qu’a connue Philippe Dagenais tient à deux choses: l’ambition et le contexte. Quand il quitte le Québec pour la France à 20 ans pour étudier avec des maîtres «architectes d’intérieur», il sait ce qu’il veut. Il rêve d’être le concepteur d’environnements le plus recherché.
À son retour à Montréal, son acharnement au travail et la visibilité de son cercle d’amis vont contribuer à lancer sa carrière. Denise Filiatrault, Yvon Deschamps, André Montmorency, Clémence Desrochers vont tous lui confier l’aménagement de leur résidence ou de leurs restaurants et boîtes de nuit.
La création du magazine Décormag au moment où Philippe Dagenais est en pleine ascension va elle aussi nourrir sa popularité. «J’étais dans toutes les éditions et si j’en manquais une, je commençais à paniquer», confie le designer qui nous a accueillis chez lui.
On a par la suite pu le voir à la télévision aux côtés de Dominique Michel ou de Danielle Ouimet dans des émissions de décoration. Une expérience «extrêmement difficile» pour lui. Il a même dû suivre un cours privé pour améliorer son aisance à l’écran.
Depuis, l’artiste de 72 ans n’a jamais cessé de pratiquer le métier qui le passionne. Au fil des ans, plusieurs clients fidèles lui ont confié leurs maisons, leurs résidences secondaires, leurs appartements à l’étranger.
«Il y a des clients que je refais et il y a des maisons que j’ai revisitées des années plus tard où le décor que j’avais fait n’a pas changé du tout», raconte celui qui a même aménagé les maisons des enfants de ses clients.
Selon lui, il est important que «ça clique» avec le client, mais il tient à ses décisions. «On va se parler avant de commencer. C’est important qu’ils m’expliquent ce qu’ils veulent, mais je dois être libre. C’est encore plus vrai aujourd’hui», mentionne-t-il.
Tout au long de sa carrière, Philippe Dagenais a tenté de créer des décors zen et épurés. Son expérience fait en sorte qu’il est encore meilleur que dans ses jeunes années. «Mon équilibre est meilleur à force de travailler les formes et les volumes», estime l’expert.
«Une vie en 3D»
Toute l’histoire du gamin qui décorait sont sous-sol devenu designer d’intérieur des artistes est racontée dans la biographie <I>Philippe Dagenais, une vie en 3D<I>. Le livre rédigé par sa nièce, l’ex-journaliste Dominique Poirier, a été publié en octobre 2013.
On y expose le parcours du designer en abordant les thèmes de la famille, de la carrière et des amours. La vie de Philippe Dagenais a d’ailleurs été mouvementée du côté amoureux. Celui qui a connu tour à tour les femmes et les hommes a quitté son épouse après 30 ans de mariage pour refaire sa vie avec son conjoint d’aujourd’hui.
Philippe Dagenais sera d’ailleurs à la Librairie des Galeries, le dimanche 29 novembre de 11h à 15h pour une séance de signatures.
Se dissocier des magasins Philippe Dagenais
À plusieurs reprises au cours de l’entrevue, il aborde le sujet de la chaîne de magasins qui porte son nom. Avec l’aide de son associé Pierre Loiselle, Philippe Dagenais a ouvert ses premiers magasins au début des années ’80.
Après avoir supervisé les achats et la direction artistique durant une vingtaine d’années, le designer s’est complètement dissocié de la chaîne en 2003. «J’ai vendu le nom «Mobilier Philippe Dagenais» au propriétaire, M. St-Georges, et je ne suis plus associé aux magasins», explique-t-il.
La nouvelle vision de l’entreprise ne correspond pas à ses critères esthétiques. L’idée de créer des grandes surfaces est contraire à son souhait d’un développement de petites boutiques personnalisées.
M. Dagenais en parle comme l’une de ses rares déceptions dans une carrière dont il est «très fier».
Des jeunes trop semblables
Lorsqu’il regarde la nouvelle génération de designers d’intérieur, Philippe Dagenais admet qu’il les trouve bons… mais tous pareils! «C’est un métier dans lequel il faut être différent. Je pense que c’est le problème de trop de jeunes designers qui font comme les autres au lieu d’être uniques», observe l’homme d’expérience.
Il se réjouit de voir qu’il existe maintenant plusieurs écoles pour apprendre le métier alors qu’à l’époque il n’y en avait qu’une. Malgré tout, il déplore de ne pas voir de nouveaux talents «vraiment exclusifs». «Ils font du travail de bon goût, mais qui ressemble au compétiteur», note M. Dagenais.